29 Janvier 1915

Cher Papa,

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Le jours s’écoulent petit à petit et la guerre continue et durera jusqu’à la victoire définitive. Patience ne nous décourageons pas et espérons toutefois en cette année nouvelle qui verra, je l’espère, la fin des hostilités.

A Bissy rien de nouveau ; il fait moins froid que dans nos contrées sûrement. Moi, je n’ai pas à me plaindre, mon feu marche jour et nuit. Je brûle : buffet, armoire en noyer, lits, chaises, fauteuils etc…choses de grande valeur avant la guerre, mais maintenant…..hors d’usage les toitures, les murs se sont écroulés dessus, c’est tout abîmé.

Je suis heureux d’avoir tiré des tranchées, au milieu de la boue et de la flotte, le jeune Po… (l’épicier) et Antoine Ro... Ils ont quitté leur Cie aujourd’hui pour rentrer à la section de mitrailleuses comme conducteurs de mulets, donc en arrière de la ligne de feu, à l’abri des balles.

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J’ai eu, Cher papa,  beaucoup de travail ces jours. Travail pas très gai, même pour moi qui suis bougrement habitué à tout ce qui se présente.

Un homme de faction à 60 m de l’ennemi a abandonné son poste… il faisait froid, disait-il, il allait se chauffer.

Hélas le malheureux ne songeait pas au crime qu’il accomplissait. Le Conseil de Guerre du Régiment le condamna le 25 janvier pour abandon de poste en présence de l’ennemi, à la peine de mort. Le 26 à 7 heures du matin après toutes les formalités faites, devant le mur, (restant de l’église du patelin), nous le fusillâmes avec le cérémonial habituel. C’était triste…. Tous, soldats, caporaux, s/officiers, officiers même, réfléchissaient…………

Heureusement que ce pauvre diable était orphelin……

Enfin c’était la première exécution que je préparais.